L’Occitane est en Provence… et aussi en Inde

Depuis 2010, l’Occitane en Provence déploie ses classiques à la pivoine, à la verveine et au karité pour séduire les Indiens. Comment s’est-elle implantée ? Et surtout comment fait-elle pour durer face à une féroce concurrence ? Gilles Moutounet, ancien country manager de la marque, revient sur le développement de l’Occitane en Inde.

Où en est L’Occitane aujourd’hui en Inde ?

Nous avons 10 magasins à Bombay, Pune, Chandigar, Calcutta, Bangalore, Delhi, Hyderabad. Vu la taille du pays, il y a encore du travail. Body Shop, en comparaison, a près de 200 boutiques.

Face à une concurrence féroce sur le marché des cosmétiques, comment L’Occitane s’est-elle implantée en Inde ?

Tout tient dans le choix des points de vente. L’Occitane est très présente dans le travel retail notamment en Asie. Elle a acquis une notoriété qu’elle n’avait pas il y a 10-15 ans. Les Indiens qui voyagent à Londres, Hong Kong, Singapour ne peuvent rater la marque dans les aéroports. Et dans les shopping mall, nous avons bien négocié nos emplacements.

Qui sont les clients de l’Occitane en Inde ?

Nos clients indiens lisent la presse, les magazines, voyagent. Ils sont modernes dans leur esprit. Mais il y a un truc différent en Inde. La gamme homme marche très très bien. Mieux ici qu’ailleurs. Elle représente 15% des produits de vente, contre 1% au Japon, par exemple, où l’Occitane est implantée depuis bien plus longtemps. Et cela sans compter les produits unisexes (shampoing, soins anti-âge). Mais là, nous n’avons pas de chiffres. L’explication ? Les hommes indiens prennent soin d’eux. Beaucoup vont suer ensemble à la gym, ils sont tous beaux et essaient de prendre soin de leur corps.

Une clientèle fidèle alors ?

70% de notre clientèle revient régulièrement. C’est le business model des marques de cosmétiques : quand un client aime bien un produit cosmétique, il revient pour en racheter. On est loin des gammes de savons avec lesquels L’Occitane a commencé dans les années 1980. Un savon, ce n’est pas très fidélisant. Alors qu’avec les cosmétiques, une fois qu’on est convaincu, on revient.

Et ce, en dépit de prix assez élevés pour le marché indien ?

L’Occitane n’est pas une marque de luxe, Nous nous situons dans le haut de gamme supérieure. C’est vrai que le panier moyen est élevé, d’autant plus que les gens achètent, en moyenne, 3 produits. Nos prix sont entre 0 et 5% plus chers qu’à Hong Kong. C’est assez courant en cosmétique : nos prix sont assez similaires partout dans le monde, hormis dans des pays comme le Japon où tout est plus cher.

Quels produits ont le plus de succès ?

Comme dans le reste du monde, la gamme à l’immortelle anti-ride et anti-âge est notre plus grand succès en Inde.

Y a-t-il des produits développés spécifiquement pour ce marché ?

Non ce n’est pas le cas. Tous les produits vendus en Inde sont fabriqués en France. On choisit dans la large gamme développée en France parmi les nouveaux produits qui sortent tous les mois. En fonction de notre connaissance du marché, on choisit de lancer tel ou tel produit.

Quid des valeurs de la marque comme l’environnement ?

Nous sommes très engagés sur l’environnement. Les vendeurs et vendeuses ont des trainings réguliers pour faire passer le message. Est-ce que les gens reviennent pour ça ? Ce n’est pas sûr. Les clients viennent d’abord parce que nos magasins sont beaux, chaleureux, ils sentent bon, respirent le bien-être. Je crois que c’est plus cela que le côté bio qui les attire.

Importer la totalité de la marchandise, c’est aussi payer des droits de douane ?

Les contraintes sont énormes, sans compter qu’en Inde, il y a toujours des problèmes avec les douanes.

Des problèmes ?

C’est un pays à problèmes. Ce qui doit se passer ne se passe pas et vice versa. Tous les jours, nous jouons les pompiers: on éteint un feu quelque part et un autre s’allume ailleurs. Il a toujours un couac, toujours un produit qui manque dans les containers. Mais c’est comme ça partout. Il n’y a qu’en Europe que ça se passe assez bien.

A Delhi, tout dépend des fonctionnaires. Ce qui est valable ce mois-ci ne l’est plus forcément le mois d’après. Il y a toujours des difficultés administratives.

Les marques occidentales parviennent-elles à s’implanter sur le marché indien ?

Il ne faut pas voir l’Inde comme la poule aux œufs d’or. Il y a, par exemple, une chaine de salons de coiffure française qui s’est implantée en Inde. Et c’est compliqué : chaque salon est profitable en soi, mais cela ne couvre pas les frais de structure.

Une grande marque de distribution de cosmétiques, présente depuis 2 ans, en est à son 3ème partenaire indien. Comment construire quand tous les 6 mois, les employés ne savent pas s’ils vont être rachetés ou pas ? Le problème, c‘est que les Occidentaux attendent des résultats trop rapidement. Réussir en Inde, c’est d’abord prendre son temps, bien choisir son partenaire et ne pas s’affoler. Il faut passer du temps sur place pour comprendre le marché, repérer les bons emplacements,  être là sur le long terme et ne pas attendre de profit dans les 3 ans à venir. Ça ne marche pas.

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